Quand il s'était levé ce matin-là, il avait presque immédiatement su qu'il devrait encore s'occuper des blessés, des cent gosses qui venaient de l'espace, des enfants du ciel. Cependant, ce jour-là plus que les autres, il n'avait pas envie de s'occuper de quoi que ce soit. Deux ans auparavant, le même jour, il avait vu la femme qu'il aimait perdre la vie et c'était une image qu'il n'arrivait pas à se sortir de la tête. Et pourtant il devait vivre avec, il devait continuer sans avoir Angie à ses côtés, et c'était d'autant plus dur quand il voyait que des gosses venus de l'espace avaient, eux, survécu à un crash alors qu'elle n'avait pas survécu à de simples coupures. Alors quand ils lui avaient dit de s'occuper d'une de ces gamins, ce matin, il avait presque immédiatement fait la gueule. Il ne voulait pas les approcher aujourd'hui et il serait probablement détestable. Mais en rentrant dans la chambre et en voyant de qui il s'agissait, toute la haine qu'il aurait pu sortir disparue. Simplement parce qu'elle était mignonne, la fille de qui il devait s'occuper, et ses premiers mots lui firent penser à Angie, encore. Il n'avait pas l'habitude de trop penser aux personnes qu'il avait perdu, il avait toujours sa mère et son père après tout. Mais il n'avait plus la femme qu'il aimait, et c'était à ses yeux la plus grosse perte qu'il ai pu avoir. Mettant ses gants à l'entrée de la pièce sans même répondre à la jeune femme, il finissait par attacher sa veste blanche correctement avant de s'approcher d'elle. « Au lieu de te plaindre, tu devrais être reconnaissante d'être encore en vie, fille du ciel. » Il lui avait répondu sur le même ton, alors que habituellement il parlait d'une voix plus posée et plus calme. Il s'était pas approché d'elle, en réalité, il était juste resté à côté de la porte, appuyé sur un meuble pour préparer la piqûre qu'il avait besoin de lui faire. Il n'avait pas envie de s'approcher d'elle, il n'avait pas envie de la toucher : rien. À ses yeux, elle n'était que la fille qui pourrait probablement le faire sortir d'ici, de cet endroit qui l'insupportait maintenant. Elle était également une potentielle ennemie, mais aussi une potentielle amie. Elle était tout, mais à la fois elle n'était rien. Finalement, il s'était rapproché d'elle, il avait posé son regard sur la jeune femme et il avait haussé les sourcils. « Tu sortiras de ce trou à rat quand t'auras appris la politesse et quand t'arrêteras d'être à ce point soûlante, ça risque de prendre un certain temps. » Il avait répondu ça avec toute l'ironie dont il pouvait faire preuve, même s'il n'était pas d'humeur à ça. Si elle faisait un peu attention à lui chaque jour, elle aurait probablement pu voir les cernes qu'il avait sous les yeux, il n'avait absolument pas dormi, pas de toute la nuit. Il avait juste passé son temps à penser à elle, à penser à Angie. Il lui avait assez rapidement injecté la piqûre dans le bras, sans faire attention à s'il lui faisait mal ou non. « Tu devrais bientôt sortir d'ici, t'en fais pas. Dans deux ou trois jours environ, le temps que ton corps se remette du crash. » Il la regardait, finissant par se retourner pour récupérer une lampe qu'il avait ramené. Il lui mit la lumière presque immédiatement dans les yeux avant de l'enlever, observant calmement autour de lui pour finalement froncer les sourcils. Il comprenait qu'elle voulait sortir d'ici, il n'aurait pas supporté longtemps cet endroit. Et c'était d'ailleurs dans ce genre d'endroit qu'Angie était morte. Cette pensée lui fit baisser les yeux, et ses larmes lui étaient rapidement monté. Regardant finalement la jeune femme, affichant ce masque souriant qu'il avait mit depuis tôt ce matin-là. C'était contradictoire avec ses larmes qui menaçaient de couler. « Je comprends que ce soit difficile d'être seul ici. Vu que t'émet plus réellement de radiations, si tu veux je peux rester avec toi.. Peut-être que tu te sentiras moins seule ? »

Elle lui a dit qu'elle aurait survécu, et ça l'a fait rire parce qu'il sait qu'elle n'est pas au courant de ce qu'il y a dehors. Alors il a hoché la tête, il a haussé les épaules et il a soupiré. Il ne savait pas quoi lui dire, alors il comptait jouer sur le sarcasme, comme d'habitude. Il a reposé son regard sur elle, fatigué. Angie. Elle lui faisait penser à Angie, encore plus à chaque seconde. « Bien sûr, t'aurais survécu. T'aurais magnifiquement bien survécu avec tes risques de commotion cérébrales, les animaux mutants et les sauvages qu'il y a dehors. Tu veux aller voir le monde dans lequel t'es tombée ? Vas-y, sors dehors. Et bonne chance pour survivre, on viendra pas te sauver une seconde fois. » Il avait répondu sur un coup de tête. Et la suite des mots de la jeune femme le firent se rendre compte qu'il montrait un peu trop ses sentiments. Alors il s'était éloigné d'elle presque directement et il avait essuyé les larmes aux coins de ses yeux. Angie, il n'y avait qu'elle dans sa tête à cet instant. Il avait envie d'en parler à quelqu'un, mais certainement pas à elle. Elle semblait se ficher de tout ce qu'il allait lui dire, alors à quoi ça lui aurait servi ? « C'est pas toi qui me donne envie de chialer. La dernière fois que je suis venu ici c'est pour voir ma petite amie mourir. J'ai pas eu le temps de lui dire que je l'aimais avant qu'elle meure. Et elle aussi elle supportait plus d'être enfermée ici. » Il s'était mit en tête que c'était de la faute de la montagne, si Angie était morte, alors que la dernière chose qu'elle lui avait dit était de sortir, qu'elle ne voulait pas le voir. Il ne l'avait pas écoutée. Il ne s'était pas rendu compte dans le fond que le fait qu'il se soit autant éloigné d'elle l'avait poussée à faire ça. S'asseyant sur le bord du meuble à côté, il posait son regard sur le sol pour finalement soupirer. « Elle a fait une tentative de suicide. Ils l'ont laissée se vider de son sang. Parce qu'à quoi ça servirait, après tout, de perdre de nos ressources pour une personne qui souhaite mourir. » Il avait posé son regard sur la jeune femme, ses yeux ne montraient plus la moindre émotion. Il n'en avait pas, à cet instant même, si ce n'était un manque total. Secouant la tête, il finissait par se relever avant de détacher sa blouse, la regardant assez sincèrement. « Si t'émettais encore des radiations, toi ou tes dents, on l'aurait déjà comprit depuis un moment parce que je serais en train de crever devant toi. T'es plus réellement un danger pour moi. Et t'es la seule du peuple du ciel qui reste à soigner. Alors ils me demanderont rien d'autre. » Sa question lui fit arquer un sourcil, et il finit par sourire assez simplement. Retirant sa blouse avant de la prendre sur son bras, il la laissa voir pour une fois par ses vêtements que c'était quelqu'un de tout à fait normal. Il portait seulement un jean avec un haut noir, et ça ne changeait pas des tenues qu'avaient ceux du peuple du ciel. « Les radiations, simplement. Pendant la troisième guerre mondiale, ils ont lancé des bombes nucléaires, du radioactif. Le monde n'était plus viable, il y en a qui s'y sont fait, leur système était plus fort que ceux des autres et ils ont survécus. D'autres, comme toi, sont partis vivre dans l'espace, personne n'y a jamais réellement cru. Et puis les derniers, qui ont du survivre différemment, qui se sont enfermés dans cette base militaire parce que les radiations n'y entraient pas. Si je m'expose aux radiations, ça me tuera. Aussi lentement et douloureusement que possible. » C'était une explication tout à fait normale aux yeux de Rider, il ne comptait pas lui dire plus gentiment ce qu'il lui arriverait s'il sortait. « Ceux qui sont allés dehors avaient des protections. Je suis médecin, alors j'y ai pas le droit. » Il avait haussé les épaules, s'approchant d'elle finalement avant de s'asseoir au bord du lit. « Au fait, je m'appelle Rider. Enfin Logan, mais je préfère Rider. C'est peut-être mieux que tu saches mon nom aussi, Aileen. »